Un récent rapport de la cour des compte (mars 2017) a réactivé la polémique. Les radars deviendraient chaque année plus rentables pour les caisses de l'Etat et ne rempliraient pas leur but initial qui est de réduire le nombre de décès sur les routes françaises. La lecture de ce rapport ne change rien à l'analyse suivante rédigé en 2016.
Si le consommateur doit s'acquitter de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques lorsqu'il fait le plein (d'où l'origine de l'expression : essence, pompe à fric) l'automobiliste n'est pas obligé de payer des amendes à partir du moment où il ne commet pas d'infractions au code de la route. Il peut donc facilement se dispenser de cette dépense dans son budget « voiture ».
Il s'agit ainsi d'une contre-vérité puisque, par cette affirmation, on laisse entendre que l'Etat gagne de l'argent sur le dos des automobilistes. Cette antienne ressort régulièrement notamment à la suite d'un rapport issu de la cour des comptes. Anoter que ce rapport ne traite pas spécifiquement du sujet mais plus globalement du budget de l'Etat de 2015. C'est en cherchant dans ce rapport que certains médias ont pu titrer comme une accusation : « les radars, c'est rentable ». A croire que le sujet fait aussi recette pour le secteur de la presse.
De façon régulière, l'anathème est jeté sur les radars qui flasheraient sans discernement comme une machine à sous. Certes, il est légitime de s'interroger sur le devenir du produit des amendes et de celui en particulier des radars.
Le chiffre de 789 millions d'euros a été brandi comme étant la somme qui serait revenue dans les poches de l'Etat en 2015, somme qui, comme le laisse sous-entendre les médias, n'aurait pas été rendu public sans l'intervention de la Cour des Comptes. Cette sortie médiatique semble vouloir méconnaitre les procédures de la loi organique des lois de finances dite LOLF.
Le budget de l'Etat est organisé en programme dont le programme 207 dédié à la sécurité routière, le programme 751 dédié aux radars et le programme 752 dédié au fichier du permis de conduire.
Il comprend également des comptes d'affectation spéciale. En droit budgétaire français, un compte spécial retrace des recettes de l'État affectées à certaines dépenses. Les comptes spéciaux sont séparés du budget général de l'État, mais leur création et les crédits qui leur sont affectés sont votés en loi de finance. Ces comptes sont transparents. Nul besoin d'attendre un rapport de la cour des comptes pour en prendre connaissance. Ils sont accessibles sur Internet.
Le déploiement des radars fait l'objet, depuis le début de cette politique publique, d'un compte spécial. Il a été versé depuis deux ans dans le compte intitulé « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » qui regroupe toutes les recettes liées aux infractions au code de la route.
Le programme 751 de déploiement des radars est financé par une fraction du produit des amendes forfaitaires dressées dans le cadre du contrôle automatisé.
Au chapitre des dépenses, l'estimation budgétaire 2015 du programme 751 a été de 217 M€ dont 117M€ pour l'achat de nouveaux radars et le programme de maintenance des radars déjà implantés, 93M€ pour le fonctionnement du centre de traitement et 6M€ pour le soutien au programme en terme essentiellement de communication. L'estimation du programme 752 a été de 22M€.
Au chapitre des recettes, le paiement des amendes forfaitaires des radars ont été de 789M€ en 2015. La question que l'on peut se poser est de connaitre quelle a été la destination des 540M€, solde entre les recettes et les dépenses.
232M€ ont été versée à l'l'AFITF (agence de financement des infrastructures de transports de France) qui dispose d'un budget de l'ordre de 1700M€. Cette agence participe au financement de projets routiers, ferroviaire et de transports urbains. L'Agence de financement des infrastructures de transports de France a été créée par le décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004, codifié aux articles R1512-12 à R1512-19 du Code des transports, dans le but d'apporter le financement des grands projets d'infrastructures de transports à horizon de 25 ans décidés un an plus tôt par un comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT).
-340M€ ont été reversée dans les recettes de l'ensemble des amendes perçues au titre d'infractions à la circulation dont les recettes ont été en 2015 de 819M€ soit au total 1160M€. Cette somme conséquente a permis de financer la FIPD (Fonds interministériels de prévention de la délinquance) à hauteur de 45M€, le dispositif d'édition des procès-verbaux électroniques à hauteur de 30M€ et les collectivités locales à hauteur de 639M€. Le solde soit 419M€ va au désendettement de l'Etat.
Il convient de rappeler que l'Etat a mis en place en 2006 un programme appelé "désendettement de l'Etat". Ce programme est alimenté par des ponctions dans toutes les recettes de type taxe et amendes. C'est dans ce cadre général que le produit des amendes du compte d'affectation spécial "Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » est ponctionné de 419M€, la part issue des radars étant de 122M€ soit 16% du montant de ces recettes.
Ainsi, il n'est pas totalement faux de dire que les radars sont rentables au sens où pour l'instant, il rapport plus qu'il ne coûte mais si l'argent des radars rentre dans les caisses de l'Etat, c'est pour en sortir utilement:
Cet argent participe au désendettement de l'Etat, ce qui allège la contribution du contribuable à ce remboursement de la dette. Le dispositif a d'ailleurs l'énorme avantage de ne rien coûter aux contribuables puisqu'il est alimenté par les recettes des contraventions. Il n'est pas non plus anormal que les personnes non respectueuses des règles participent à ce désendettement.
Ce dispositif a largement fait la preuve de son efficacité depuis sa mise en place en 2002. Le déploiement des radars s'est traduit par une baisse significative des vitesses pratiquées et en conséquence par la baisse spectaculaire de l'accidentalité, particulièrement de la mortalité routière. Deux études ont montrés qu'entre 2002 et 2010, 65 à 70% de la baisse de la mortalité pouvait être attribués à la mise en place du dispositif de déploiement des radars. Une autre démontre que la part des accidents mortels pour non-respect des vitesses maximales autorisées a diminué de 45% à 28%.
Les détracteurs des radars ont tenté de contester ces résultats sans parvenir à démontrer le contraire. C'est pourquoi ils ont donc opté pour un autre argument qui peut davantage trouver l'adhésion des automobilistes, celui selon lequel les radars seraient une « pompe à fric » servant au désendettement de l'Etat.
Cet argent des radars a fait baisser la mortalité routière et continue de la faire baisser même si ce résultat parait moins visible en ce moment. A supposer qu' une nouvelle politique de sécurité routière conduise à se passer des radars, la mortalité routière actuellement remonterait aussitôt d'environ 25% soit environ 850 personnes tuées supplémentaires et autant d'handicapés. Les radars évitent à l'Etat des coûts médicaux de plus d'un milliard d'euros.
Finalement, ce qui gêne véritablement les détracteurs des radars, c'est probablement de ne pas pouvoir rouler au-delà des vitesses autorisées et de courir ainsi le risque de perdre leur permis. Car, ce dispositif a également eu pour conséquence de fragiliser le permis de conduire. Il a donné tout son sens au permis à points. Cette fragilisation a été amoindrie par l'apparition des avertisseurs d'une part et par l'assouplissement du système de récupération de point d'autre part. C'est aussi ces raisons qui rendant les radars moins efficaces, ce qui a donné une nouvelle argument aux détracteurs des radars !!
https://www.ccomptes.fr/Accueil/Publications/Publications/Le-budget-de-l-Etat-en-2015-resultats-et-gestion
https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/sites/performance_publique/files/farandole/ressources/2015/pap/pdf/DBGPGMPGM751.pdf
https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/sites/performance_publique/files/farandole/ressources/2015/pap/pdf/PAP_2015_CAS_Radars.pdf