Contrôle technique DES motoCYCLETTES : pour ou contre ?

La mesure 13 du CISR du 2 octobre 2015 instaure un contrôle technique pour la vente de deux-roues motorisés d'occasion à échéance de deux ans, afin de sécuriser le parc d'occasion et de protéger l'acheteur.

Le contrôle technique des motocyclettes fait débat depuis quelques années, les associations de motocyclistes ne voulant pas en entendre parler. Jusqu'à présent, les motocyclettes n'étaient pas soumises à un contrôle technique obligatoire.

Pour autant, un contrôle technique a été rendu obligatoire pour tous les véhicules de plus de trois roues au début des années 1990. L'objectif à cette époque était en priorité un objectif de sécurité routière quand bien même un défaut d'entretien du véhicule (usure des pneus, défaut de signalisation, usure des freins, ..) n'était présent que dans un peu moins de 15% des accidents graves et qu'il en était rarement l'élément déclencheur.

Régulièrement, la réglementation du contrôle technique fait l'objet d'une actualisation, notamment pour ce qui concerne les points de contrôle et l'obligation de remise en conformité. A chaque fois, se pose la question d'étendre ce contrôle aux deux-roues motorisés. Une première tentative a visé les cyclomoteurs. Annoncé en 2010 pour une mise en place en 2012, ce projet s'est enlisé pour des questions essentiellement de rentabilité économique, le contrôle technique en France étant réalisé par des opérateurs privés.

La mortalité des motocyclettes étant préoccupante, la question d'élargir le contrôle à tous les 2RM restait d'actualité. Ainsi, une récente directive européenne demande aux Etats-membres de mettre en place un tel contrôle. La date d'application initialement prévue en 2016 a été repoussée de 6 ans (soit en 2022).

Toutefois, cette directive permet à un Etat de ne pas le mettre en œuvre s'il peut présenter des mesures de sécurité routière efficaces de remplacement,
en tenant compte en particulier des statistiques des cinq dernières années sur la sécurité routière.  Cette possibilité d'exemption a été le fruit du travail des associations de motocyclistes françaises qui s'opposent fermement à un contrôle technique. Ces associations ont su convaincre  l'Etat français pour qu'il négocie cette porte de sortie.

Elles ont mis pour cela  en avant les résultats d'une étude intitulée MAIDS (Motorcycle accidents in-depth study). Cette étude a été financée principalement par les constructeurs de deux-roues à moteur. Elle a été conduite par des bureaux d'études de cinq pays différents (dont, pour la France, le Centre européen d'études de sécurité et d'analyse des risques).

Cette étude montre que l'âge de la moto ne serait   la « cause primaire » de l'accident que dans 0,3 % des cas ; il constituerait un « facteur contributif »
seulement dans 5 % des cas.

En conséquence, les associations en concluent qu'un contrôle technique n'aurait qu'un impact très limité sur la réduction du nombre des accidents. Elles ne voient dans cette mesure qu'une tentative de racket menée par le lobby du contrôle technique. Elles estiment de surcroît que le contrôle technique pour les véhicules de tourisme n'a pas prouvé son efficacité. 

Pour autant, prévenir 5% des accidents de motocyclistes constitue un gisement non négligeable à traiter.  Le raisonnement macro-économique avancé ne peut aller à l'encontre de la réalité de ces accidents qui ont un coût pour la société.  L'UE l'a bien compris en adoptant cette directive.

D'ailleurs, il n'est dans l'esprit de personne de remettre en question le contrôle technique des véhicules à quatre roues (bien apprécié par celui qui achète un véhicule d'occasion).

Les progrès en matière de sécurité routière s'obtiennent en éliminant aussi bien les causes principales de mortalité très fréquentes comme la vitesse ou l'alcool que les causes à priori secondaires plus rares mais tout aussi dommageables.

On peut faire l'hypothèse que si le contrôle technique incite un grand nombre de propriétaire de véhicules à changer son train de pneu usé, c'est autant de risque d'accident par éclatement qui est évité. Ce raisonnement vaut aussi bien pour les motocyclettes.

Dans un système « conducteur-véhicule-route », il paraîtrait surprenant que le seul contrôle de la conformité à la règle ne s'applique qu'aux conducteurs et non aux propriétaires du véhicules et en particulier aux propriétaires d'un deux-roues motorisés. C'est pourquoi on peut espérer que ce débat devrait prendre fin au plus tard en 2022 par la généralisation du contrôle technique aux deux-roues motorisés d'autant qu'il y a peu de chance que la clause d'exemption soit respectée.

La décision du CISR du 2 octobre 2016 est donc en cohérence avec la directive européenne. Sa mise en œuvre cependant risque d'être semée d'embuches.  Les
motocyclistes ne vont pas manquer de manifester leur opposition. Il pourrait avoir comme allié le ministère des transports en charge du contrôle technique qui ne semble pas à ce jour très motivé pour le mettre en œuvre.

A suivre donc


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